Assis sur son trône dans l’immense salle d’honneur du grand Hall de Karath-Hin, Hardrek Ironwrist méditait. Le monarque absolu du royaume nain ne prêtait qu’une attention distraite aux gardes qui se relayait près des portes ou aux serviteurs qui passaient discrètement pour accomplir leurs tâches quotidiennes. Même la somptuosité des lieux, véritable bijou au sein de la montagne, ne parvenait pas à le tirer de ses pensées.
Et pourtant force était d’admettre que la salle du trône n’avait pas son pareil dans le monde connue. Assez grande pour des milliers de nains puissent y acclamer leur suzerain, ce Hall massif taillé profondément dans les Monts Gris était recouvert d’or et de pierres plus précieuses les unes que les autres. Dix nains se tenant par la main n’auraient pu faire le tour des colossaux piliers qui soutenait la voute perdue dans les ténèbres que n’éclairait pas les torches placée près du sol.
Oui, tout en ces lieux prenait des proportions gigantesques. Amusant pour les nains non ? Et ce d’autant plus que rares étaient les humains à être autorisés à y pénétrer. Le regard du roi se posa sur les massives portes, là où s’était tenu le dernier combat contre les vampires de la Garde de Sang, les plus puissants serviteurs du seigneur de Gaste. Leur offensive contre le cœur du royaume nain avait été brisée à cet endroit, la résistance acharnée des guerriers barbus venant finalement à bout des maléfices de roi vampire.
Désormais, la cité de Karath-Hin pourrait résister à un tel assaut. Les nains avaient bien tirés les leçons de l’attaque des vampires, analysant minutieusement les faiblesses dont ils avaient alors fait preuve. Non, aujourd’hui, même l’élite des troupes de Gaste ne percerait pas les défense naines sans endurer des pertes colossales. Les Monts Gris bne craignaient plus la menace venues de l’Est, bien que selon d’inquiétantes rumeurs certaines ruines bruissaient à nouveau d’activité.
Non, le danger n’est pas Gaste, pas encore du moins, marmonna Hardrek.
La morosité du roi venait de rapports d’espions placés dans l’empire de Tilée. Selon ces rapports, deux légions se rassemblaient non loin d’Houersan, bien que leurs intentions précises restaient un mystère.
Tilée… autrefois le plus puissant empire qui soit, dont les légions avaient conquis le monde… aujourd’hui le symbole de la débauche et de la décadence. Mais Hardrek savait qu’un adversaire affaibli n’en reste pas moins dangereux, près à jouer le tout pour le tout dans un dernier coup de dés. Or si l’impératrice avait ordonné que deux de ses meilleurs légions se rassemblent, ce n’était surement pas pour satisfaire un caprice.
L’empire cherchait-il à rouler des mécaniques ? Voulait-il rappeler que le Golfe des Sirènes restait un de ses terrain de chasse ? Possible, la diplomatie est aussi l’art de menacer sans le dire. Pourtant, ce comportement ne ressemblait pas avec l’attitude habituelle des impériaux. Leur orgueil et leur rappels perpétuels d’un glorieux passé ne collait pas avec des attitudes de matamore. Si leurs armées se préparaient, les risques d’une guerre devenaient non négligeables.
Une guerre… mais contre qui ?
Le roi ne craignait guère une attaque directe contre les Monts Gris. Mener une armée dans ce dédale de cols et de petits chemins tortueux relevait du défi. Les nains maitrisaient le sous-sol et avaient déjà à plusieurs reprises montré qu’ils pouvaient lancer des attaques surprises en se basant sur une utilisation intelligente du réseau souterrain que constituait leurs mines. Deux légions contre la forteresse de Karath-Hin ? Non, ce serait une folie suicidaire. La cible de l’empire devait être autre.
Peut être l’impératrice désirait-elle attaquer le sultanat, de Kaliorn, son trop puissant voisin qui lui faisait de plus en plus d’ombre ? A moins que le royaume, affaibli par ses problèmes de succession, ne soit une proie trop tentante ? Ou peut être les elfes, encore que cela semblait aussi hasardeux que de s’en prendre aux nains. Non, le sultanat ou le royaume constituaient les cibles les plus vraisemblables. La logique le voulait, mais Farjax savait que la logique n’est pas toujours respectée à la guerre.
Se levant, le roi se dirigea vers ses appartements d‘un pas lent. Pour l’instant, il ne pouvait rien faire… rien faire d’autre qu’attendre et voir.